On a testé la nouvelle muséographie du Mémorial des Martyrs de la Déportation
illustration article
  • Description
  • Lieu & Horaires
  • Tarifs
  • Le 24 avril 2016, la nouvelle muséographie du Mémorial des Martyrs de la déportation a été inaugurée en présence de Manuel Valls. Un événement qui est passé plutôt inaperçu, à tel point qu’à DéMUSEElé, on s’est demandé ce que ce lieu pouvait bien contenir de si terrifiant pour ne pas avoir droit à un reportage télé. Ni une, ni deux, nous sommes partis enquêter sur place. Détour sur l’Île de la Cité à la découverte d’un édifice à mille lieux des horreurs primaires perpétrées dans les camps de la mort.

    Suite à une restriction des droits photographiques, les images nous ont été fournies par l’ONACVG (Hauts-lieux de mémoire d’Île-de-France) sous le copyright "Jacques Robert SGA/DMPA". 


    Venir au mémorial

    Le mémorial se situe sur l’Île de la Cité, à la pointe de la presqu’île, juste derrière la cathédrale de Notre-Dame. On est également près du Mémorial de la Shoah, bien que le lieu n’en dépende pas.

    En apparence, le lieu ressemble à un parc public, la construction se trouvant sous terre. On préfère donc le métro ou le vélib’ pour s’y rendre.


    L’histoire du lieu

    Le mémorial nait sous l’impulsion de l’association du Réseau du souvenir. Créée en 1952, elle a pour mission, entre autre, d’entretenir le souvenir de la déportation et de susciter la réflexion des contemporains sur les enseignements à en tirer. C’est cette association qui est à l’origine du film Nuit et Brouillard d’Alain Resnais. Après 10 ans de démarches, le mémorial voit le jour en 1962. Il est inauguré par Charles de Gaulle, alors président de la République. Lieu dédié à la mémoire des 200 000 français déportés, l’établissement rend aussi hommage aux martyrs de la Seconde Guerre Mondiale en traitant des camps de concentration à l’échelle de l’Europe. En 1964, l’association offre le mémorial à l’Etat français pour renforcer son action. Un parcours complémentaire est inauguré en 1975, puis en 2015, il est décidé de rénover le lieu, pour adapter la visite aux publics à mobilité réduite et pour rajeunir certaines installations. Le parcours a ainsi gardé l’aspect imaginé par son premier architecte Georges-Henri Pingusson.


    Le bâtiment

    Nous l’avons évoqué plus haut, le mémorial est enterré et donc difficilement identifiable de prime abord, même si il y a tout de même quelques indices. La visite débute avec une plaque rappelant que ce lieu existe à cause mais aussi grâce aux actions de l’homme. Une seconde plaque comporte la carte des lieux de mémoire de la déportation en région parisienne.

    Derrière un parterre de fleur, on aperçoit un muret et des escaliers. Avant de pénétrer dans le sanctuaire, on fait un détour par l’accueil, car il y a des consignes à respecter. Des panneaux et un fléchage auraient été les bienvenus, au moins pour savoir où débutait la visite.

    Pour descendre, il faut emprunter l’escalier le plus proche des rives de la Seine. Le mémorial est truffé d’escaliers, qui sont volontairement difficiles. Si vous avez des problèmes de mobilité, demandez à l’accueil à emprunter les aménagements spécifiques, mais il semblerait que l’ensemble du site ne soit totalement accessible.

    En contrebas des escaliers, on tombe sur un espace triangulaire, dont l’extrémité laisse entrevoir la Seine derrière des barreaux. L’entrée se trouve juste en face, entre les deux gros blocs.Le passage est étroit et conduit dans la pénombre à une première salle composée d’un autel central, de la tombe d’un déporté inconnu et d’un aménagement recouvert de perles de verre et baigné d’une lumière douce, comme celle d’une bougie.

    On gagne ensuite le premier niveau en empruntant les escaliers sur la gauche (en entrant). Les salles sont dépouillées d’objets, et ne comportent que quelques cartes, des noms et des citations sur les murs ainsi que des écrans tactiles avec des ressources documentaires. 

    On poursuit par un couloir plongé dans l’obscurité présente une sélection de photos sur le quotidien des prisonniers dans les camps, car même dans ce lieu de mort, on découvre que la vie a repris son cours. Les collections présentées ne sont pas imprégnées de violence et ne choquent pas (profondément) le visiteur. Et malgré l’apparente barbarie de certaines photos, on ressent aussi une très grande humanité dans des visages.

    Au fond de la dernière salle, celle qui propose la projection d’un petit film sur un écran, se trouve les escaliers pour redescendre. 

    En arrivant au rez-de-chaussée, une construction présente des niches triangulaires comportant des cendres prélevées sur dans les fours crématoires de différents camps. On retombe ainsi sur la pièce qui abrite la tombe du déporté inconnu, au niveau de la sortie.


    La muséographie

    En apparence, le mémorial est simple, mais tout est extrêmement bien pensé. En mettant le visiteur au cœur du parcours et en lui faisant confiance, il l’amène à comprendre le lieu par lui-même. Tout est ici en retenu. Il n’y a pas de panneau narrant des scènes d’horreurs ni de photos sanguinolentes. En choisissant une présentation documentaire, le mémorial a fait le bon choix, en nous montrant qu’une sensibilisation est possible en impliquant plutôt qu’en imposant.

    La muséographie est construite autour des symboles, parfois à double sens, qui nous obligent à réfléchir. Ainsi, la volonté d’enterrer le lieu nous rappelle que certaines populations ont dû se cacher. Mais il nous interroge aussi sur la nécessité du devoir de mémoire et de son matraquage quotidien. Au final, de savoir qu’un lieu est là, que nous pouvons le voir quand nous en sentons le besoin permet de ne pas s’y habituer au point de ne plus le voir. Ce qui est passé est passé, mais il sommeille près de nous, et nous ne devons pas l’oublier.

    Le choix d’une lumière douce, rappelant la flamme d’une bougie, symbolise l’autel érigé en mémoire des morts mais aussi l’espoir que la leçon soit à jamais retenue. La forme triangulaire faire écho à l’étoile de David que les « marginaux » devaient porter mais reprend aussi la forme d’un panneau signalant un danger imminent. Enfin, il y a le choix de la police d’écriture. Les lettres sont comme tracées au couteau, profondes, longues et couleur rouge sang, rappelant ainsi les mutilations subies par les déportés mais aussi les traces d’ongles sur les murs des chambres à gaz.

    Le parcours est volontairement difficile physiquement, les escaliers sont étroits, étriqués et pénibles. On souffre nous aussi dans ce mémorial. Le sens de la visite n’est pas non plus évident, on tâtonne, on cherche notre chemin, comme si nous étions nous aussi pris au piège entre ces murs de béton.

    Mais la vraie puissance du lieu, c’est de nous amener à ressentir et à comprendre tout cela nous même, sans guide et sans panneau. On ne sort pas du lieu traumatisé, obsédé par les images, avec comme seul désir, d’oublier ce qu’on vient de voir mais grandi et pensif. A noter que ce lieu a été voulu universel, et qu’il est donc gratuit pour tous.


    Mon avis

    Je ne connaissais pas ce mémorial, et pourtant, je suis passée de nombreuses fois devant, sans suspecter son existence. J’avoue ne pas être fan de ce genre de lieu et j’ai plutôt tendance à les fuir. Alors que je me suis lancée dans cette visite, c’était à reculons et blindé  pour que ce que je pensais découvrir ne m’impacte pas trop. Mais au final, le lieu n’a rien de choquant. Il n’y a pas d’images trashs ou difficiles, tellement moins efficaces que le choix du mémorial.  Si vous avez peur de ne pas comprendre le lieu, car le symbolique ce n’est pas votre fort, tentez tout de même la visite, car je suis sûre que la muséographie aura un écho sur vous, même particulier.  Si au contraire vous être très émotif (comme moi), sachez que le lieu est élégant et ne tire pas vers le pathos… Vous avez donc pas à craindre la crise de larmes. Je recommande donc la visite à tous et je vous encourage à (re)découvrir ce lieu de mémoire, dont les enseignements sont encore d’actualité, 70 ans après la libération des camps.



    Source

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Mémorial_des_Martyrs...

    http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/memorial-de...

  • Horaires

    Du 1er octobre au 31 mars : de 10h à 17h
    Du 1er avril au 30 septembre : de 10h à 19h

    Fermé le lundi

  • Gratuit